Vous le savez, j’aime les histoires, les analogies. Ce sont autant de portes directement ouvertes sur notre imaginaire.
Elles regorgent de bon sens, et nous apportent une aide décalée pour avancer sur notre chemin.

Aujourd’hui, il est question de fêlure, d’estime de soi et de comment nous pouvons offrir cela au monde.
A savourer.

Il arrive que, lorsque nous nous regardons un peu dans un miroir, nous focalisons sur ce qui ne va pas, ce qu’on n’aime pas, nos petits défauts, nos imperfections.

Il arrive que, quand nous pensons à qui nous sommes, nous soyons attentifs, non pas à nos richesses et à ce que nous apportons au monde, mais à nos petits travers, nos fêlures, nos incapacités à … [mettre ce que vous voulez à la place des trois points].

Il est possible que ces façons de se voir, de s’imaginer, soient liées à la façon dont on nous a regardé enfant, aux injonctions qu’on a reçues … ou à celles qu’on a intégrées sans savoir si, finalement, c’était bien ça que l’on nous disait.

Toujours est-il que cela peut nous empêcher de croire en nous et venir mettre à mal notre estime de nous-même.

Et si l’on se trompait ? Et si ce que l’on pense / croit / imagine être « un défaut » était une chance, une bonne chose ? Et si on était tout simplement « à côté de la plaque » sur ce que nous pensons de nous ? Et si finalement, notre juge le plus sévère n’était pas « le regard de l’autre » mais notre propre regard et jugement sur nous ? 

Le conte du porteur d’eau met en images quelques réponses à ces questionnements ! Bonne lecture !

Il était une fois un porteur d’eau avec ses deux jarres. Elles étaient suspendues chacune au bout d’une pièce de bois qui épousait ses épaules. Tous les jours, il allait à la rivière chercher de l’eau pour la rapporter chez lui, et tous les jours, il prenait le même chemin. C’était un travail difficile mais nécessaire.

L’une des jarres avait une fêlure et laissait échaper un peu de sa précieuse cargaison le temps du trajet. L’autre jarre était en très bon état et conservait parfaitement toute son eau jusqu’à la maison.

Tous les jours, à chaque voyage, la première jarre arrivait à moitié pleine et elle en avait tellement honte ! Impossible pour elle d’accomplir ce pour quoi elle avait été créée. Quant à la seconde jarre, bien sûr, elle était fière de savoir si bien remplir sa mission.

Au bout d’un certain temps, de plus en plus triste, avec une sensation permanente d’échec et d’inutilité, la jarre fêlée parla au porteur d’eau quand ils étaient près de la rivière.

— Oh, porteur d’eau ! Je me sens tellement coupable. Je suis inutile et incapable (*) d’assurer ma mission correctement. Je te prie de m’excuser.

— Mais, de quoi te sens-tu coupable ? De quoi as-tu honte ?

— Depuis tout ce temps, tu t’escrimes à porter de l’eau depuis la rivière jusque chez toi, et moi, à cause de ma fêlure, je laisse échapper la moitié de mon eau. Par ma faute, une partie de tes efforts ne sert à rien !

Le porteur d’eau fut touché par la détresse de la jarre. Il lui répondit :

— Pendant le trajet de retour, je voudrais que tu regardes sur le bord du chemin, de ton côté, et que tu me dises ce que tu vois.

Alors la jarre fêlée regarda. Elle vit des fleurs magnifiques tout le long du chemin, de son côté. C’était vraiment très beau et toutes ces couleurs lui mirent du baume au coeur. Mais arrivée à la maison, elle était toujours triste car, une fois encore, elle avait perdu la moitié de son eau.

Alors, le porteur d’eau lui dit :

— As-tu vu que de ton côté du chemin, il y avait de magnifiques fleurs ? Et que, du côté de la jarre « parfaite », il n’y en a pas ? Tu vois, j’ai toujours su que tu avais une fêlure, et c’est même pour cela que je t’ai choisie. Je savais que tu perdrais de l’eau le long du chemin. Alors, j’ai planté des graines de fleurs de ton côté. Et chaque jour, à chaque voyage que l’on faisait, tu les as arrosées tout le long du chemin. Pendant tout ce temps, j’ai pu grâce à toi cueillir de superbes fleurs que j’ai offert aux personnes que j’aime. Sans toi, cela n’aurait pas été possible. Et je tenais à te remercie d’être telle que tu es. 




(*) Vous pouvez remplacer par le mot qui correspond à ceux que vous portez sur vous régulièrement : inutile / incapable / moche / grosse / maigre / …